Kasper versus Ratzinger (suite)

Il y a deux jours, le cardinal Kasper a accordé une interviewe à Paolo Rodari, qui travaille désormais pour... la Repubblica!! C'est cette interviewe que JL Restàn a choisie pour base de sa dernière réflexion (8/3/2013)

Cf. Kasper versus Ratzinger

     

Le texte - mesuré, mais fort - de JL Restàn, s'appuyait sur une interviewe du cardinal Kasper, réalisée par Paolo Rodari pour... la Repubblica.
Cette "souplesse" de certains journalistes, quel que soit leur présumé domaine de compétence, pour passer d'un titre de presse à l'autre (même s'ils sont a priori diamétralement opposés sur la sphére des medias) laisse songeur.

Si ce qui est rapporté dans cette interviewe est vrai, Walter Kasper - mis ici sur le même plan théologique que Joseph Ratzinger, ce qui peut se discuter - n'a pas changé depuis 2005. Il porte encore les théories de Hans Küng, médiatisation en moins. Peter Seewald n'avait pas menti. Et ses conseils à "Ratzinger" sont tout simplement ahurissants. Non pas que le Saint-Père Benoît s'en formaliserait, mais était-il bien nécessaire de confier cela aux medias - qui plus est au pire d'entre eux?...
Ces propos datent d'il y a deux jours (selon Walter Kasper, les cardinaux se connaissaient à peine) et ce soir, la date du début du Conclave a été fixée au mardi 12 mars, dans quatre jours..
Le cardinal allemand n'est vraiment pas un prophète.
Tout le problème est de savoir si sa ligne théologique, à la veille du Conclave, est encore susceptible d'influencer des cardinaux électeurs.

     

Le manifeste de Walter Kasper à deux pas du conclave
«D'abord les réformes, inutile de brûler les étapes. Et à Ratzinger, je dirai de ne pas se laisser utiliser».
6 mars 2013
(Article paru dans La Repubblica, texte en italien ici)
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«C'est le moment d'une longue réflexion. Les choses seront différentes de ce qu'elles ont été quand Joseph Ratzinger a été élu en 2005. Ce conclave doit être préparé dans le calme. Entre cardinaux, nous nous connaissons à peine. Il faut du temps. Rien ne presse, l'«extra omnes» (la formule par laquelle le conclave s'ouvre) peut attendre, pour le moment».

Walter Kasper, allemand comme Ratzinger, est l'une des figures les plus éminentes du prochain conclave. Hier, il a eu 80 ans, mais comme le Siège Apostolique est vacant depuis le 1er Mars, il aura accès à la chapelle Sixtine. Il y entre comme le plus âgé des cardinaux. Et pas seulement, il y entre comme le seul cardinal de la Curie romaine - pendant dix-huit ans, il a dirigé le «ministère» qui s'occupe d'œcuménisme - qui été capable de tenir tête à Ratzinger sur son terrain, la grande théologie. D'un côté, Ratzinger, chef de file des néo-conservateurs, de l'autre Kasper, leader des progressistes (!!!)

- Eminence, que direz-vous à Benoît XVI quand vous irez le trouver, après la fin du conclave?
«Beaucoup de choses. La première est une recommandation. Je lui suggèrerai de ne se laisser utiliser par personne. C'est un trop gros risque que le gouvernement de l'Eglise subisse son influence. Cela ne doit pas être. Il a fait un choix clair, ce qui suppose de se mettre en retrait. Il devra, par conséquent, être discret. Éviter d'entrer dans les questions relatives à la gouvernance des politiques de l'Église, dans les politiques ecclésiales. Et puis je lui parlerai amicalement de ce qui nous plaît à tous deux, la théologie».

- Un sujet très important en Allemagne, c'est l'indépendance des Eglises locales vis-à-vis de Rome. Le Pape est considéré comme une figure d'autorité qui impose d'en haut ses diktats. Et le sentiment de séparation d'avec Rome, le sentiment que l'on peut se passer de Rome, est enraciné. Qu'en pensez-vous?
«Qu'il faut une nouvelle modalité dans l'exercice du gouvernement de l'Église. Cette modalité s'appelle collégialité, un gouvernement plus horizontal. La collégialité doit s'étendre des évêques à des formes de représentation de toutes les composantes du peuple de Dieu. Une telle collégialité irait dans la direction du Concile Vatican II, de l'unité dans la diversité entre tous les croyants dans l'Evangile et d'un plus grand dialogue avec les autres religions. Il faut sortir des sécheresses du centralisme romain, développant la conviction que centre ne signifie pas centralisme».

- À la lumière de la nécessité d'une plus grande collégialité, estimez-vous que la Curie romaine, ainsi qu'elle est structurée, doit être reconsidérée?
«La réforme de la Curie est une priorité. Mais en même temps, c'est un gros problème. Parce qu'aujourd'hui, à la curie romaine, il n'y a pas de dialogue interne. Les dicastères ne se parlent pas, il n'y a pas de communication. Et cet état de choses doit être changé».

- C'est également à la lumière d'une curie structurée de manière "verticale" qu'ont pu naître les factions opposées qui ont finalement conduit à la déflagration des Vatileaks?
«Dans les congrégations générales, nous n'avons pas encore parlé de Vatileaks. Je pense que la curie, en général, au-delà de ce qui a émergé avec Vatileaks, devrait être révolutionnée. Et je pense qu'en plus du mot réforme, il faut en utiliser un autre: la transparence. La curie doit commencer à s'ouvrir, à ne pas craindre la transparence».

- Ratzinger dans les méditations du Chemin de Croix en 2005 a parlé de la "saleté" dans l'Eglise. Il y a quelques heures un cardinal écossais a annoncé ne pas assister au conclave pour avoir eu un "comportement inapproprié" envers des séminaristes. Comment se sent un prince de l'Église face ces nouvelles?
«Pas très bien. Ratzinger, cependant, a montré une nouvelle voie, qui est la ligne du nettoyage dans l'Église. Je lui en rends acte: il a agi différemment des autres».

- Le célibat, le sacerdoce féminin, l'homosexualité. Les questions qui agitent la conscience de nombreux fidèles reviennent en force dans le débat public. Sur les catholiques divorcés qui une fois remariés ne peuvent pas accéder à la communion, Ratzinger avait déclaré que "le problème doit être encore approfondi" (??). Jusqu'où peut aller l'Eglise?
«L'interdiction de donner la communion aux divorcés remariés est une blessure. Je ne veux pas indiquer la voie à suivre, mais une chose est certaine: nous avons besoin d'une sérieuse remise en question sur le sujet. Il faut l'humilité d'aborder la question au cas par cas. La règle peut être modifiée en fonction des différentes situations».

Vous avez des favoris sur le prochain Pape?
«Je souhaite que poersonne ne soit entravé. Nous devons être ouverts à tous, à toute nationalité et géographie de l'Eglise».